Les textes lus ou chantés aux vêpres et aux matines de ce Dimanche insistent sur la réalité de l'Incarnation. En effet, la venue du Christ dans la chair constitue le fondement du culte des images. Le Christ incarné est l'Image essentielle, le prototype de toutes les images. Quelques phrases du Triodion expriment bien le sens profond du culte rendu aux icônes.
«En vérité, l'Eglise du Christ s' est parée du plus bel ornement par les saintes icônes du Christ notre Sauveur, de la Theotokos et de tous les Saînts glorifiés.., En gardant l'icône du Christ que nous louons et vénérons, nous ne risquons pas de nous égarer. Que ceux qui ne croient pas de la sorte soient dans la confusion. Car notre agenouillement devant le Fils incarné et non pas l'adoration de son icône est une gloire pour nous».
Les Saints glorifiés ont été des images vivantes, quoiqu'imparfaites, de Dieu. Ils ont été des reproductions affaiblies de la vraie Image divine, qui est le Christ. Pendant la liturgie de ce dimanche, dans la lecture de l'épître aux Hébreux (11:24-26. 32-40), nous entendrons l'écrivain inspiré décrire les souffrances de Moise et de David, des patriarches et des martyrs d'Israël, de ceux dont le monde n'était pas digne», qui ont été flagellés, sciés, décapités et dont la foi a cependant vaincu le monde. Ceux-là ont été des images inscrites, non sur le bois, mais dans la chair. Ils figuraient déjà, ils annonçaient l'Icône définitive, la Personne du Sauveur.
L' évangile du jour n' a pas de rapport direct avec les images ou avec l' Orthodoxie. Dans la lecture évangélique, nous voyons l' apôtre Philippe amener à Jésus Nathanaël qui, lui-aussi, va devenir un disciple. Jésus dit à Nathanaël : "Avant que Philippe ne t'appelle...quand tu étais sous le figuier, je t'ai vu». Nathanaël, bouleversé par cette révélation, déclare : "Rabbi, tu es le Fils de Dieu». Jésus répond que Nathanael verra "mieux encore» que cette vision à distance. «Vous verrez les cieux ouverts et les anges de Dieu monter et descendre sur le Fils de l'homme».
Ces paroles offrent un vaste champ à notre méditation.
Nous ne savons pas ce que faisait ou pensait Nathanaël sous le figuier.
Heure de tentation, ou de perplexité, ou de grâce ? ou simplement
de repos ? Mais il semble que le Seigneur ne mentionnerait pas cet épisode
si celui-ci n'avait pas été un moment décisif, un
point tournant dana la vie de Nathanaël. Dans la vie de chacun de
nous, il y a eu le moment ou les moments où nous étions "sous
le figuier», des moments critiques, où Jésus, lui-même
invisible, nous voyait et intervenait. Intervention acceptée ou
repoussée ?
Souvenons-nous de ces moments...
Adorons ces interventions divines. Mais ne nous arrêtons pas à
elles. Ne nous fixons pas sur une vision passée: «Tu verras
mieux encore». Demeurons prêts pour la grâce nouvelle,
pour la vision nouvelle. Car la vie du disciple, si elle est authentique,
monte de clarté en clarté. Nous pouvons voir «les cieux
ouverts et les anges monter» vers le Sauveur ou descendre sur nous.
Indication précieuse de cette familiarité avec les anges
qui devrait nous être habituelle.
Le monde des anges ne nous est
pas moins proche ni moins aimant que le monde des hommes.
Extraits du livre "L'an de grâce du Seigneur" du Père
Lev Gillet
("Un moine de l'Eglise d'Orient") aux éditions du Cerf